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vendredi 12 décembre 2014

Ali Ben Salem: un combat pas comme les autres en quelques lignes



Il est né le 15 juin 1931 à Bizerte.

A 7 ans, son père est tué par balles au cours d'une manifestation contre l'occupant français. A 14 ans, il rejoint le maquis et s'engage dans la lutte armée contre cet occupant. A 16 ans, le tribunal militaire français le condamne à mort par contumace pour des actes de guérilla à Bizerte. A 24 ans, alors que la Tunisie est sous régime d'autonomie interne, il est condamné à la clandestinité et à l'exil pour s'être attiré les foudres de Bourguiba et de Ben Youssef réunis, ayant refusé de se ranger derrière l'un ou l'autre. A 30 ans, il a failli laisser la vie dans la bataille d'évacuation de Bizerte, blessé au cou et au dos. A 32 ans, il est condamné aux travaux forcés à perpétuité pour avoir participé à la tentative de complot contre Bourguiba en 1962. Sa femme meurt alors qu'il est en prison et l'administration pénitentiaire l'empêche d'assister à son enterrement. Après avoir purgé 11 ans de bagne, il est gracié avec tous les membres du groupe des insurgés en 1973.
A 46 ans, il cofonde la Ligue tunisienne des droits de l'homme (LTDH) et milite en son sein pour la libération des prisonniers politiques opposants au régime de Bourguiba.
Sous le régime de Zine el-Abidine Ben Ali, il continue son combat farouche et ne plie jamais. A partir de 1991, il mène plusieurs campagnes contre l'emprisonnement des partisans du mouvement Ennahdha et d'autres pour l’amnistie de tous les prisonniers politiques. En 1998, il participe à la fondation du Conseil national pour les libertés en Tunisie. En avril 2000, alors qu'il est septuagénaire, il est aspergé de gaz lacrymogène et roué de coups dans un commissariat de Tunis. De graves lésions de la colonne vertébrale, un traumatisme crânien et des contusions s'ensuivent, faisant de cette agression un acte de torture en bonne et due forme. En 2002, il s'oppose au référendum amendant la Constitution de 1959 (amendement permettant au président Ben Ali de se présenter une nouvelle fois aux élections présidentielles). En 2003, il fonde avec Radhia Nasraoui l'Association de lutte contre la torture en Tunisie. En même temps, il contribue à la dénonciation de plusieurs affaires de corruption impliquant le président et sa famille.
À partir de novembre 2005, il est soumis à la surveillance quotidienne par une patrouille de police stationnée devant son domicile. On lui interdit de recevoir des visites. On lui coupe le téléphone. On le suit à chaque déplacement.
Le 3 juin 2006, âgé de 75 ans, il est enlevé de son lit par la police et maintenu en détention pour trois jours.
C'est, en quelques mots, le parcours de Ali Ben Salem, doyen des défenseurs des droits de l'homme en Tunisie. On ne le dira jamais assez: ce que ce militant a enduré pour la Tunisie et la démocratie, aucun Tunisien n'en a souffert le centième. En retour, après la révolution de 2010-2011, certains Tunisiens ne sont pas embarrassés de payer d'ingratitude un tel combat.

Contrairement aux islamistes qui ont réclamé à l'Etat des dédommagements et les ont obtenus, Ali Ben Salem n'a rien demandé. Même pas à recouvrer son droit à la couverture sociale et à la retraite. En 2011, quand Moncef Marzouki est devenu président provisoire, apprenant que le militant âgé de 80 ans ne disposait d'aucune ressource matérielle depuis qu'il a té privé de son travail par le dictateur déchu, il lui a accordé une allocation mensuelle de 500 dinars (€250). Mais dès que le président a su que Ali Ben Salem avait des contacts avec Nidaa Tounes (le parti fondé par Béji Caîed Sebsi), il a suspendu l'obole présidentielle.

Le peuple lui a néanmoins permis de prendre sa revanche aux dernières élections législatives. Le mardi 2 décembre 2014, Ali Ben Salem a présidé la première séance du nouveau parlement tunisien, en sa qualité de doyen d'âge des députés élus. Un grand moment d'émotions non seulement pour ce militant hors pair dans l’histoire de la Tunisie, mais pour tout le pays qui a suivi en direct cette plénière inaugurale.



A. Amri
12.12.14

samedi 4 mai 2013

Elle n'est pas complément d'objet

L'une des fiertés nationales tunisiennes, c'est que le peuple dont 53% sont des femmes a une longue tradition de lutte féminine. Présente et pesante dans la révolution du 14 janvier, la femme tunisienne n'est pas prête à prêter l'allégeance pour une nouvelle dictature. Bien plus que les hommes, pour des raisons que le commun des Tunisiens n'ignore pas, les femmes n'accepteront jamais de se soumettre à la servitude d'un État islamiste.

S'il plait à quelque 20% de la population(1) d'être le bon troupeau des apôtres de l'obscurantisme, il est du devoir de chaque citoyen se reconnaissant dans le reste de l'électorat de défendre les fondements de son émancipation. La démocratie, les droits de l'homme, les libertés individuelles sont l'affaire de l'ensemble des forces opposées au projet islamiste, femmes et hommes confondus.

Quand, le 30 avril dernier, Leila Debba a "accueilli" à sa façon (voir vidéo ci-dessous) le prédicateur égyptien débarquant à l'aéroport de Tunis-Carthage, ce n'est pas seulement un acte de résistance féminine qu'il faut lire dans le geste de cette femme. N'en déplaise à la minorité tenue par le carcan islamiste, c'est la colère de tout un pays que cette brave avocate a traduite avec brio. Car ce peuple n'a pas besoin qu'on le catéchise ou lui rappelle l'islam. Il est musulman et fier de l'être depuis le 7e siècle, plus musulman que les camelots du wahabisme, vils rentiers de la foi altérée et transformée en industrie de l'ignorance(2) et de la mort. Il est de longue date musulman, ce peuple, et c'est lui qui a étendu vers l'Europe la conquête islamique, quand l'islam était lumières et grâces pour l'humanité. Il est musulman et il se réclame de cette noble lignée d'esprits phares qui font la richesse de son patrimoine: Saint-Augustin, Ibn Khaldoun, Lella Manoubia, Kheirddine Pacha, Ahmed Ben Dhief, Béchir Sfar, Tahar Haddad, Mohamed Ali El-Hammi, Farhat Hachad, Mohamed Fadhel Achour, Habib Bourguiba, Chokri Belaid... Ce ne sont pas les wahabistes qui pourraient citer autant de références dans leurs lumières, autant de jalons phares dans leur histoire, mais ce sont les Tunisiens. Ceux-là mêmes qui ont initié le Printemps arabe, déboulonnant l'une des plus puissantes dictatures au monde et brisant pour les peuples frères le mur de la peur. Ce ne sont pas les wahabistes qui ont réalisé cela mais les héritiers des lumières tunisiennes, femmes et hommes libres de ce pays.


Les wahabistes eux, en l'an 2013, considèrent que la terre est plate et ne tourne pas! et ils jugent hérétique quiconque dira le contraire!(3)

Quand, le 30 avril dernier, Leila Debba a "accueilli" à sa façon le prédicateur égyptien débarquant à l'aéroport de Tunis-Carthage, ce n'était pas de sa part un geste de provocation qui vise les islamistes de ce pays. C'était plutôt la réaction légitime de sa conscience libre, le front de fierté à lever face aux profanateurs de la Tunisie (locaux et étrangers confondus), l'irrépressible cri pour le peuple tunisien et musulman qui en a ras-le-bol de ces insultes répétées à l'endroit de sa tunisienté et son islam. L'islam authentique qui ne rime pas avec l'islamisme.

L'énième prédicateur invité par Ennahdha dans notre pays aux dépens du contribuable, blanchi, nourri et rémunéré en devises fortes pour les conférences débiles et abrutissantes qu'il doit donner aux âmes damnées du wahabisme, nuit à notre jeunesse et n'accomplit rien de salutaire pour le peuple confronté à tous les besoins et tous les périls. Terrorisme, fascisme, cherté de prix, chômage, constitution qu'on tente de détourner au profit d'un parti, élections qu'on renvoie incessamment aux calendes grecques, légitimité de pouvoir jour après jour contestée et devenue caduque. Et le parti islamiste arguant de cette légitimité pour faire de la Tunisie sa légitime irrépudiable n'a d'autre souci que de dérouler des tapis rouges sous les pieds des pâtres de chameaux qui se relaient pour nous "éclairer".

Pour le parti qui se croit l'élu de Dieu, ces "lanternes wahabistes", ces pondeurs de fatwas inouïes autorisant, ou appelant ouvertement la femme à concourir au jihad par le vagin(4),  rendent incontestablement d'éminents services. Ils détournent l'attention des périls qui menacent et des besoins qui pressent. Et de par le bourrage de crâne qu'ils accomplissent, le lavage des cerveaux, ils poursuivent le travail de sape engagé depuis les élections du 23 octobre 2011 contre les défenses de la cervelle tunisienne. Ce que le prosélytisme wahabiste veut réaliser au pays de Haddad et Bourguiba, aux pays des lumières musulmanes, c'est ni plus ni moins que conquérir et domestiquer la cervelle qui pense. Condition sine qua non de la viabilité de tout projet islamiste. Tant que le Tunisien est intelligent, que son esprit critique n'est pas tétanisé, l'islamisme ne peut faire long feu en Tunisie. D'où la tâche dévolue aux bons apôtres du wahabisme, conquérants par procuration de la cervelle jusqu'ici imprenable.

Alors quel mal à ce que la femme tunisienne botte au cul les ennemis de l'intelligence tunisienne?
Cette femme n'est pas complément d'objet. Pas sujet passif. Pas sujet de calife. Pas pronom de l'absent comme le veut la grammaire de ceux qui vivent à 15 siècles derrière la révolution. Ceux qui se vautrent dans le cloaque du puritanisme dénaturant l'humain, respirent l'obscurantisme infect et se nourrissent des crottes merdeuses de l'ignorance.


La femme tunisienne est une citoyenne et un être humain à part entière(5). Et elle n'entend pas céder aux phallocrates, islamistes ou de tout autre bord, ni sa part de vie ni sa part de combat. Leila Debba, Besma Belaid, Khaoula Rachidi, Radhia Nasraoui, Maya Jribi...et ce ne sont que d'infimes graines ans le chapelet des figures féminines tunisiennes, sont l'âme inaltérée de la Tunisie pionnière, berceau du droit constitutionnel et promotrice des émancipations(6). Il y a près de 3000 ans, l'histoire de la femme tunisienne débute avec Didon (Elissa), fondatrice et première reine de Carthage. Avec Sophonisbe, deux siècles avant J-C, c'est la première Bouazizi au féminin qui s'immole pour l'honneur de Carthage. Au 7e siècle, Al Kahina est l'incarnation de la résistance nationale face au conquérant arabe. Au 8e -douze siècles avant Bourguiba et le Code du Statut Personnel, Aroua abolit la polygamie! Au 14e, Lella Manoubia instaure la mixité dans les lieux de prière et devient cheftaine de confrérie religieuse!


Et cette histoire rayonnante du combat féminin se poursuit encore sous l'occupation française: Aziza Othmana(7) , Bechira Ben M’rad(8), Tawhida Ben Cheikh(9), Radia Haddad(10)...


Mais cela, il n'est pas certain que les ennemis de l'intelligence tunisienne sachent ouvrir un livre l'histoire et le déchiffrer pour comprendre la teneur de ces propos. Tant pis pour eux!




Leila Debba: une colère légétime

A. Amri 
03.05.2013

Notes:

1-
Chiffre des électeurs islamistes ayant voté le 23 octobre 2001 pour Ennahdha.

2- L'exemple de Cheikh Ibn Bâz contestant la rotondité et la mobilité de la terre (voir note 3) peut nous faire rire tant il parait insolite à l'âge des satellites et de la conquête spatiale. Mais nombreux sont les exemples illustrant cette ignorance offerte en pâture aux ânes bâtés qui la gobent, faute de cervelle chez ces âmes damnés du wahabisme et ses prédicateurs.
Une belle illustration sur la vidéo ci-dessous:


Louées soient les crottes de nos cheikhs!

Une autre sur ce lien: un prédicateur wahabiste considéré par ses disciples comme "une sommité de l'islam", le plus savant des humains! La panacée de la pauvreté et de la crise économique en terre musulmane, concoctée par Cheikh Abou Ishak al-Houini 

3- "Allah nous informe qu’Il a fait de la terre une demeure stable et qu’Il l’a fixée et stabilisée grâce aux montagnes. Il en a fait une demeure stable pour Ses créatures. Ils peuvent se déplacer, dormir, cultiver et planter des arbres. Ils peuvent également avoir des activités sur les mers pour survenir à leurs besoins. Si quelqu’un prétend qu’elle vogue dans l’espace, cela ne signifie pas forcément qu’il dit vrai, indépendamment du fait qu’il soit communiste, chrétien, juif ou musulman. La Parole d’Allah est plus véridique que toute autre parole..." Cheikh Ibn Bâz

4- Le jihad du niqah institué par des fatwas wahabistes permet à la femme de satisfaire les besoins sexuels des jihadistes engagés en Syrie. Toute femme âgée d'au moins 13 ans peut contribuer à cette "guerre sainte" en accordant ses faveurs à autant d'hommes qu'elle peut afin d'entretenir le moral des soldats de Dieu.

5- Le poète Mohamed Essghaier Ouled Ahmed pourrait même faire des enchères à ce propos, qui affirme que "la femme tunisienne est une femme et demi en-sus !"



Oyoun Al-Kalam (Amel Hamrouni & Khmaïes Bahri)

les femmes de mon pays
 
J'ai écrit, tant écrit
Épuisant les lettres et les dits
J'ai décrit, tant décrit
Épuisant les mots inédits
Je dis, donc, en bref et je passe
la femme de mon pays
est mesurable à l'aune 
d'une femme et demi
6- Premier pays à se doter d'une constitution au monde arabo-musulman (1861), historiquement la Tunisie est aussi le pays de la meilleure constitution au monde selon Aristote qui, entre -350 et -360, écrivant son livre Politique dans lequel il étudie l’origine, la finalité et le fonctionnement de l’État, rend hommage à la constitution carthaginoise: "Carthage paraît encore jouir d'une bonne constitution, plus complète que celle des autres États sur bien des points, et à quelques égards semblable à celle de Lacédémone. Ces trois gouvernements de Crète, de Sparte et de Carthage, ont de grands rapports entre eux ; et ils sont très supérieurs à tous les gouvernements connus. Les Carthaginois, en particulier, possèdent des institutions excellentes ; et ce qui prouve bien toute la sagesse de leur constitution, c'est que, malgré la part de pouvoir qu'elle accorde au peuple, on n'a jamais vu à Carthage de changement de gouvernement, et qu'elle n'a eu, chose remarquable, ni émeute, ni tyran.
Je citerai quelques analogies entre Sparte et Carthage. Les repas communs des sociétés politiques ressemblent aux Phidities lacédémoniennes ; les Cent-Quatre remplacent les Éphores ; mais la magistrature carthaginoise est préférable, en ce que ses membres, au lieu d'être tirés des classes obscures, sont pris parmi les hommes les plus vertueux. Les rois et le sénat se rapprochent beaucoup dans les deux constitutions ; mais Carthage est plus prudente et ne demande pas ses rois à une famille unique ; elle ne les prend pas non plus dans toutes les familles indistinctement ; elle s'en remet à l'élection, et non pas à l'âge, pour amener le mérite au pouvoir. Les rois, maîtres d'une immense autorité, sont bien dangereux quand ils sont des hommes médiocres; et ils ont fait déjà bien du mal à Lacédémone."
Aristote (Politique) - Traduction française : BARTHÉLEMY SAINT-HILAIRE
La Tunisie est également l'un des pays pionniers de l'abolition de l'esclavage (1846), et de l'institution des droits de minorités,
ayant proclamé le Pacte fondamental( عهد الأمان).5- ) en 1857.

7- Cette femme est le symbole du pouvoir dévoué à son peuple, pour les œuvres de bienfaisance accomplies et ses rapports hors commun avec le personnel du palais. 

8- Militante du mouvement national et fondatrice de  l'UMFT (Union musulmane des femmes tunisiennes).

9- P
remière bachelière de Tunisie, première femme médecin et gynécologue au monde arabe, initiatrice avec Bourguiba du planning familial en Tunisie.

10- Militante du mouvement national tunisien, elle est vraisemblablement la première femme en Tunisie à avoir rejeté le port du voile. Après l'indépendance, présidente de l’UNFT (Union Nationale des femmes de Tunisie) elle est l’une des premières femmes parlementaires en Afrique et dans le Monde Arabe.

Quand les médias crachent sur Aaron Bushnell (Par Olivier Mukuna)

Visant à médiatiser son refus d'être « complice d'un génocide » et son soutien à une « Palestine libre », l'immolation d'Aar...